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Le Clavier bien tempéré vol.I














Ecoutez ces majestueux sujets de fugue énoncés dans le grave, nobles et un brin traînants, comme chantés sur un pédalier d’orgue. Ou encore, dans le Prélude en si bémol majeur, les bariolages répartis entre les deux mains qui acquièrent ici une fluidité guitaristique.

Inattendue aussi, la réorganisation de la hiérarchie des voix et des plans sonores, par les tempos apaisés, sans que le seuil de l’exagération ne soit jamais franchi. Atténuant souvent l’éclat des voix supérieures, c’est le caractère même de ces pages qu’il détourne parfois, les amenant vers une mélancolie consolatrice superbement assumée. La douceur qui baigne tout le premier livre est due au phrasé particulier de Vieru, qui exploite subtilement des variations de couleurs, d’intensité pour mener les phrases. On dépeint souvent le Bach de Vieru comme « intériorisé », il serait ici plus juste d’évoquer la confidence.

Diapason

Chaque maillon du Clavier bien tempéré peut être une chose et son inverse. C’est ce dont témoigne le pianiste français d'origine roumaine Andrei Vieru, 47 ans ; celui-ci a parsemé son enregistrement du Premier Livre, qui paraît chez le label français Alpha, de variantes, incluses au parcours même des 24 préludes et fugues.

Vieru se fiche de la grammaire et du vocabulaire baroques. Les ornements passent le plus souvent à la trappe ou sont articulés de manière mécanique. Mais, chez Vieru, la chose paraît secondaire tant le jeu du pianiste est architecturé. Dès le premier prélude, le fameux prélude « blanc » en ut majeur, mais dans sa deuxième version (plage 2), Vieru fait entendre un crescendo dans l’amollissement du son, gagné progressivement par la « liquidité » apportée par la pédale forte et la légère rétrogradation du tempo. En quelques instants, un « théâtre acoustique » est installé.

La sonorité est d’un beau mordoré, profonde, propice à de subtiles gradations de densité, de texture, d’articulation, le jeu de pédales est subtil. Les longues fugues trouvent dans ce jeu noble mais jamais hautain l’une de leurs plus belles incarnations au disque : la fugue finale du premier livre, dans le même si mineur tourmenté que celui du « Kyrie » de la Messe en si, le dit avec cette évidence aveuglante qui n’appartient qu’aux grands interprètes.

Le Monde

Nous pouvons virtuellement entendre la pensée de Vieru respirer avec la musique. Sa façon de jouer nous invite à réfléchir.

The Independent

Quand on a affaire à la sensibilité et à la méticulosité de cet interprète, on n’a plus envie d’écouter d’autres enregistrements du Clavier Bien Tempéré.

Pizzicato

La précise architecture du Clavier bien tempéré n’exclut pas ses riches frémissements émotifs : préludes et fugues envoûtants, mélancoliques, troublants ou joyeux, allègres et vertigineux. Vieru en exprime les nuances sans trahir leur unité ni briser leur élévation douce et soutenue vers une sereine clarté. Aucune déchirure n’en ternit l’éclat et pourtant la fragile humanité transparaît dans la douceur radieuse du pianiste roumain qui suggère avec bonheur la persévérance de l’âme vers l’envol.

www.ramifications.be

C’est comme si l’interprète sondait la vibration propre à chaque section pour mieux l’adapter à son diapason interne. Cet enregistrement de Vieru, a quelque chose d’une méditation. Une méditation sur la fidélité et l’inspiration à l’heure où la question se pose d’interpréter cette partition au piano moderne, en optant finalement pour une position paradoxale : un vol poétique, subtil au plus haut degré, qui ne cesse de respirer et d’animer l’immense rigueur structurelle de ces architectures sonores si légères et si complexes.

Le résultat est fascinant. C’est comme d’écouter un Bach – un grand Bach – dans lequel résonne obscurément, surgissant d’une strate très profonde et occulte, le battement du dernier Beethoven ou du dernier Schubert. Nous attendons avec intérêt la deuxième partie de ce Steinway bien tempéré.

 

Diverdi

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